Origine du nom

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Autrefois paroisse, aujourd'hui commune, Les Nouillers est une bourgade du canton de Saint-Savinien, en Charente-Maritime. Mais pourquoi « Les Nouillers » ? L'origine de ce nom se perd dans l'Antiquité, preuve que le lieu est connu de l'homme, et même habité et exploité de longue date. Les noms de lieux comme celui-ci sont, pour la plupart, issus de mots régionaux aujourd'hui tombés en désuétude. Plusieurs hypothèses ont été avancées quant à l'origine de celui de la commune.

Les légendes

Un lieu arrosé

La première en attribuerait l'origine aux Santons, peuple gaulois habitant les terres qui allaient devenir la province de Saintonge. En effet le mot gaulois nou ou noué désigne un lieu arrosé, un pré bas, ou un marécage[1]. En vieux français, nouer signifie nager. Un exemple en est donné dans la biographie de Saint-Louis[2] :

« Le Roy envoia querir les maistres mariniers des nefz, qui amenerent avecques eulx quatre plungeons, gens qui vont à nou au fond de l'eauë comme poissons. »

Cette thèse est appuyée par l'abondance des cours d'eau des environs[3]. Les Nouillers sont bordés par la Boutonne au nord, affluent de la Charente ; celle-ci serpente à quelques kilomètres au sud, le long de Saint-Savinien. Le Gouttemer, petit ruisseau qui prend sa source chez Cartier, serpente à travers le bourg pour se verser dans la Boutonne. À l'est, le Vivier dessine la frontière entre les Nouillers et Voissay, lui aussi se perdant dans la Boutonne. La bande de terre au nord de la commune, bordant la Boutonne, à longtemps été une région marécageuse et insalubre.

Les villégiatures d'Ausone

Une seconde hypothèse situerait l'origine du nom sous la domination du Bas-Empire romain, comme étant la résidence secondaire d'Ausone, le Pagus Noverus.

Étymologie et évolution

Une explication beaucoup plus probable se base sur une colonisation du site par des paysans gallo-romains. Au Moyen-Âge, la paroisse s'appelle Novelarii ou Novellarii. On en retrouve la trace en 1272 dans les lettres d'abandon d'Aymeric Guibert au maire et à la commune de Saint-Jean-d'Angély[4]. Le nom apparait encore un demi-siècle plus tard dans les comptes de l'archipresbytère de Taillebourg, pour la levée de subsides du pape Jean XXII[5]. On retrouve un peu plus tard, en 1529, une déformation en Novalarii dans une notice des évêques et des bénéfices à la nomination de l'évêque de Saintes[6]. Ces différentes versions découlent du latin novale, terre nouvellement défrichée et mise en culture, et novalis, jachère que l'on laisse reposer un an[7]. C'est ainsi que les gallo-romains désignent les terres conquises sur l'antique forêt qui recouvre l'essentiel de la région, et sur lesquelles se créent généralement un village d'agriculteurs.

Le nom de la paroisse se francisera par la suite en Noveliers ou Novelières[note 1][8][9][10]. Ces termes sont de la famille de novel, vieux français des adjectifs nouvel, nouveau.

Aussi, le nom de la paroisse évolue au fil des époques en Noulliers, comme en atteste en 1650 la carte de Sanson[11] :

Reproduction de la carte de Nicolas Sanson, 1650. Les Nouillers et ses environs.

Cela reste la graphie la plus répandue aux XVIIe et XVIIIe siècle, que l'on retrouve notamment en 1692 dans une déclaration des biens de mainmorte[note 2] dans le diocèse de Saintes[12], ainsi que la carte de Cassini de 1771[13]. Cette graphie persistera jusqu'au début du XXe siècle, bien qu'informellement.

La variante Noulliers était toujours utilisée au début du XXe siècle. Ici, la famille Durand posant devant la carriole de distribution du pain. Cliché estimé aux environs de 1905. Archives familiales, famille Coadou-Servant.

Entre temps, le nom arrive sous sa forme finale des Nouillers ou Nouilliers[14][15] à la fin du XVIIIe siècle au cours de la Révolution, comme en atteste le Bulletin des lois ; les deux versions coexistent au cours du XIXe siècle. L'une des toutes premières apparitions du nom des Nouillers sous sa forme courante remonte néanmoins à la carte de Nolin[16] :

Reproduction de la carte de Jean-Baptiste Nolin, géographe ordinaire du roi, v. 1688. Les localisations des villages restent aléatoires, mais les graphies de leurs noms sont frappantes de ressemblance avec celles aujourd'hui connues.

Les variantes

Au cours des évolutions de la langue française, le nom du village fut parfois déformé de façons plus ou moins heureuses. On peut citer notamment :

  • La Noulie[17] (1621)
  • Les Mouliers[18] (1707-1793)

Liens externes

Wikipedia : Ancien français

Notes

  1. D'autres noms de lieux ont suivi la même évolution. On peut citer La Novelère en 1361 et La Nouhelière en 1558, aujourd'hui toutes deux La Naulière, respectivement des commune d'Allonne et de Pompaire dans les Deux-Sèvres. Comme pour Novelarii-les Nouillers, on y constate un amuïssement de la consonne labiale derrière le « O » et des prétoniques internes.
  2. Se disait des biens des communautés, des hôpitaux, etc., considérés comme inaliénables, exonérés des droits de mutation et assujettis à une taxe spéciale. (Dictionnaire de l'Académie Française)

Références

  1. Marie-André-Arthur Éveillé. Glossaire saintongeais. H. Champion, Paris, et V. Moquet, Bordeaux, 1887.
  2. Jean de Joinville. Histoire de Saint Loys, IX. du nom, Roy de France. Entre 1305 et 1309.
  3. Améric-Jean-Marie Gautier. Dictionnaire des communes de Charente-Maritime. Les chemins de la mémoire, novembre 2004.
  4. Société des archives historiques de la Saintonge et d’Aunis, éditeur. Archives historiques de la Saintonge et d’Aunis, volume 24, registres de l’échevinage de Saint-Jean d’Angély. A. Picard et Z. Mortreuil, Paris, Saintes, 1895.
  5. Société des archives historiques de la Saintonge et d’Aunis, éditeur. Archives historiques de la Saintonge et d’Aunis, volume 45. A. Picard et J. Prévost, Paris, Saintes, 1914.
  6. Cholet (abbé) : Études historiques, géographiques, archéologiques sur l'ancien diocèse de Saintes. Z. Drouineau, La Rochelle, 1864.
  7. Félix Gaffiot. Dictionnaire latin-français. Hachette, 1934.
  8. Jacques Duguet. L’origine du nom des Nouillers. Bulletin de la Société de Géographie de Rochefort, 1(2):36–37, mars-décembre 1958.
  9. Jean-Baptiste La Curne de Saint-Palaye. Dictionnaire historique de l’ancien langage françois, volume 8. L. Havre, Niort, 1875.
  10. Bélisaire Ledain. Dictionnaire topographique du département des Deux-Sèvres. A. Dupont, Poitiers, 1802.
  11. Nicolas Sanson. La Saintonge vers le Septentrion avecq le pays d'Aulnis et les Isles de Ré et Oléron. 1650.
  12. Société des archives historiques de la Saintonge et d'Aunis, éditeur. Archives historiques de la Saintonge et d’Aunis, volume 35. A. Picard et Mme Fragnaud, Paris, Saintes, 1905.
  13. César-François Cassini de Thury, éditeur. Carte générale de la France, volume 102, Saintes. Dépôt de la guerre, 1771.
  14. Bulletin des Lois de la République Française. Partie supplémentaire, n°204. Décret n°5415. Décret qui autorise l'inscription, au Trésor public, de cent vingt-six Pensions militaires et à titre de Récompense nationale, du 18 juillet 1851.
  15. Bulletin des Lois de la République Française. Partie supplémentaire, n°131. Décret n°1740. Décret portant concession de 109 Pensions de retraite sur les fonds de la Caisse des Invalides de la Marine, du 12 mars 1872.
  16. Jean-Baptiste Nolin. La généralité de La Rochelle. Vers 1688.
  17. Jean le Clerc. Le Théâtre géographique du Royaume de France. Paris, vers 1621.
  18. Alexis-Hubert Jaillot. La Province de Poitou et le Pays d'Aunis. Plusieurs versions entre 1707 et 1793.